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L'Accueil des NACs en clinique vétérinaire

Mélanie Coquelle Par Le 06/11/2022

Par Matthieu Yacoub, ENVT promotion 2027 (surnom : pioupiou 1.0)

Matthieu calopsitte

Avec 6 millions de foyers français accueillant aujourd’hui un Nouvel Animal de Compagnie, la médecine vétérinaire NAC est devenue une spécialité à part entière, tout comme le maintien de NAC en milieu domestique s’impose comme une tendance à part entière. Mais qui dit nouvelle tendance dit améliorations en ligne de mire ! En effet, que ce soit chez le propriétaire ou chez le vétérinaire, tout n’a pas été miraculeusement mis en place sans aucun problème dès le début, et de nombreuses améliorations et optimisations sont à faire. Nous allons donc nous questionner sur la problématique suivante : comment optimiser l’accueil des NACs chez le vétérinaire ?

 

Il faut tout d’abord prendre en compte le rôle joué par le propriétaire dans cet accueil : celui de le rendre possible par la prise de rendez-vous. C’est en effet le dit-propriétaire qui est en mesure de remarquer un signe de mal-être chez son animal. De plus, l’animal ne parlant pas, il lui faut réussir à expliquer la raison de la visite de son compagnon à poils, plumes ou écailles. Son rôle ne s’arrête pour autant pas là. De fait, il doit également amener son animal chez le vétérinaire et, durant la consultation, le rassurer. Cela permet alors au vétérinaire d’effectuer plus efficacement son auscultation. 

Alice sevrain calopsitte

 

Ses rôles peuvent être divisés en plusieurs catégories. Tout d’abord, il va évidemment soigner ou à minima s’assurer de la bonne santé de son patient. En parallèle, il lui faut minimiser au maximum le stress du NAC, mais également réduire celui du propriétaire. En effet, si l’idée du “NAC qui claque” est exagérée et même erronée, il faut tout de même prendre en considération l’impact négatif du stress de l’animal sur la qualité de la consultation et des soins apportés par le vétérinaire. Cet impact est d’ailleurs démultiplié lors d’une hospitalisation. Enfin, il lui faut pouvoir conseiller au mieux le client afin de trouver le meilleur rapport entre soins efficaces et coûts financiers pour le propriétaire. 

 

Mais ce qui est le plus amusant avec les NACs, c’est l'impressionnante diversité des animaux pouvant être rencontrés en consultation, et par extension l’ensemble des spécificités de chacune des ces espèces, ainsi que les contraintes que tout cela implique. De fait, il faut tout d’abord voir que mammifères, oiseaux et reptiles ne se traitent pas de la même façon. Puis, parmi les mammifères, il faut différencier les NACs proies que sont les rongeurs et les lapins et la plupart des oiseaux, du NAC prédateur qu’est le furet. On peut même aller plus loin en remarquant qu’au sein même des rongeurs et des lapins, il existe des différences d’accueil et de soin du NAC, notamment dûes aux différences de taille, de caractère, de vivacité ou encore de résistance au stress et à la douleur. Ainsi, un lapin ou un furet pourront être laissés en liberté dans la salle de consultation, leur permettant de découvrir les lieux et ainsi de se rassurer, ce qui ne pourra être fait avec un hamster ou un serpent. 

Mel gris du gabon

Il faut également penser à changer de serviette de contention entre un prédateur et une proie, ainsi qu’à adapter la contention à l’animal. De fait, un lapin se porte plutôt en contention “chaise”, tandis qu’un furet, un hamster, une gerbille ou un oiseau plutôt en contention “sac à dos” . Et ne parlons même pas de la contention du serpent, qui nécessiterait certainement une formation à part entière. Chez les oiseaux, il vaut mieux privilégier tant que faire se peut un premier examen à distance afin de réduire au maximum le stress et la durée de manipulation, d’autant plus lorsque cet afflux de cortisone risque d’être régulièrement engendré, comme en hospitalisation par exemple.

 

 

 

L’hospitalisation est encore une autre histoire, avec des besoins particuliers pour chaque espèce . De plus, il y a une nécessité de séparer les NACs proies de potentiels prédateurs comme les chats. Effectivement, le stress est déjà accru par l’environnement inconnu et la présence d’humains tout aussi inconnus, effectuant de drôles de manipulations. Si on s’intéresse alors aux NACs proies, on remarque que la présence à la chatterie des prédateurs félins renforce le stress du patient. Ajoutons à cela que, les lapins et les rongeurs étant des animaux macrosmiques -c'est-à-dire présentant un excellent odorat-, cette présence sera repérée par la simple odeur du prédateur. De plus, l’humain lui-même peut se parer d’une odeur de prédateur selon les animaux côtoyés, ou même son alimentation. Tout ceci n’est malheureusement pas toujours compris par les vétérinaires et ASV canins. En effet, beaucoup de cliniques canines installent les NACs hospitalisés dans la chatterie. Cela ne doit pourtant pas être pris à la légère, car pouvant par exemple engendrer une cardiomyopathie de stress chez le lapin6

 

Il est également un autre problème dans l’accueil des NACs : le turn-over d’un jour à l’autre des effectifs vétérinaires et ASV canines. Cela entraîne régulièrement des difficultés dans le suivi, notamment concernant l’interprétation de signes cliniques d'aggravation d’un cas. De plus, il peut devenir compliqué d’obtenir les informations nécessaires à un diagnostic à distance quand plusieurs ASV observent et interprètent différemment les mêmes comportements du patient, aboutissant à des contradictions. La pratique NAC au sein d’un établissement canin ne devrait pas être considérée comme une activité mineure, car le soin des NACs requiert un temps considérable.

Cochon d inde

Ainsi, les problématiques liées à l’accueil des NACs sont nombreuses, que ce soit du côté du propriétaire, du vétérinaire, ou encore en rapport avec l’hospitalisation. Et qui dit nombreuses problématiques dit nombre d’optimisations possibles.

 

 

 

 

La première optimisation, qui s’applique au propriétaire de n’importe quel animal de compagnie, est de connaître parfaitement son animal, aussi bien en tant qu’animal d’une certaine espèce et des systémiques associées qu’en tant qu’individu à part entière. En clair, il doit avoir connaissance de ses habitudes, savoir l’observer, reconnaître les signes de souffrance de l’animal et les urgences propres à son espèce, pouvoir différencier stress et souffrance. Pour cela, il lui faut passer du temps avec lui et à l’observer. Ici arrive un nouveau point : le training médical. Bien que pouvant être limité chez les reptiles par exemple, tout animal habitué à être manipulé sera plus simple à ausculter et à soigner. On peut même aller plus loin avec certains animaux, notamment les oiseaux qui peuvent y être très réceptifs, en mettant en place un véritable training médical. Ne serait-ce qu’apprendre à l’animal à ne pas bouger lorsqu’on l’ausculte ou lui fait une injection quelconque est une grande aide. Le training médical réussit alors l’exploit de diminuer le temps de consultation et le stress de l’animal, ainsi que de ravir les humains. 

Marion turk calopsitte

Une autre grande aide consiste à minimiser le stress dès le transport, par exemple en prenant le chemin  le plus court, en plaçant l’animal dans le noir complet, en lui proposant des distractions durant le trajet, des draps avec une odeur connue ou encore en le déplaçant avec son compagnon habituel s’il ne vit pas seul. Continuons avec une autre optimisation, qui se révèle être primordiale chez les oiseaux mais si peu respectée, consistant à mettre en place des contrôles de santé réguliers afin de prévenir tout problème de santé. Si cela est vrai et bien respecté pour les NACs mammifères, notamment du fait des vaccins annuels qui donnent lieu à un examen de santé pré-vaccination, ce n’est que très peu mis en place par les propriétaires d'oiseaux. Malheureusement, les oiseaux ne montrent véritablement leurs problèmes de santé généralement que lorsqu’ils n’ont plus la force de les cacher, soit quand il est possiblement déjà trop tard. Seul le contrôle régulier de santé chez le vétérinaire permettrait de se rendre compte en amont du problème et ainsi le traiter au plus vite, accroissant les chances de réussite. 

Transport oiseau exemple serviette sac vent drnacophile proteciton

Et si ce sont les finances qui peinent à suivre, alors une bonne idée consiste à prendre une mutuelle pour animaux. Bien que moins développées et complètes que les mutuelles humaines, elles se développent progressivement et commencent à couvrir de plus en plus d’actes médicaux et de plus en plus de NACs. Il en existe par exemple pour lapins, furets, cobayes, chinchillas et perroquets. L’avantage est alors de pouvoir couvrir l’ensemble des soins nécessaires au petit animal sans que l’argent ne soit un frein trop important, permettant ainsi une optimisation de l’accueil du NAC, que ce soit en fréquence de consultation chez le vétérinaire qu’en qualité des soins.

 

 

 


 

Revenons, pour commencer, sur la gestion du stress. Tout d’abord, le vétérinaire peut proposer au client de mettre l’animal au calme ou dans une salle d’attente réservée aux proies afin d’éviter au patient une rencontre olfactive, visuelle ou auditive avec de potentiels prédateurs. De plus, dans l’idéal, il faudrait avoir le temps de laisser systématiquement au patient, qu’il soit un rongeur, un lapin, un furet ou un oiseau, un temps de liberté dans la salle afin qu’il apprivoise ce nouvel environnement. Nous pouvons d’ores et déjà remarquer la difficulté de cette approche du fait du temps limité de la consultation, mais également de l’impossibilité de le faire pour un oiseau non-éduqué (risque de fugue) ou des petits rongeurs (risque de blessure trop important). En outre, les salles des cliniques canines ne sont pas toujours adaptées du fait de l’organisation des meubles notamment (passage possible sous les meubles).

Preparation magistrale delpech

Du côté des soins, le monde vétérinaire propose maintenant du matériel adapté aux NACs. Les médicaments en revanche sont souvent non-homologués pour les NACs car étant pensés pour les chiens et chats. Cela n’est assurément pas pratique du fait des posologies très différentes entre patients de canine et patients NACs. Une optimisation intéressante serait alors de développer des versions NACs de ces dits médicaments afin d’éviter les erreurs de dilution lors de sa préparation. Notons tout de même que certaines pharmacies proposent des médicaments reconditionnés adaptés aux NACs en concentration, arômes, et molécules actives. Elles passent pour cela généralement par un préparateur externe, qui a fait des études de stabilité sur un certain nombre de molécules, et peuvent déjà envoyer le médicament personnalisé aux clients directement à domicile.

 

 

 

 

 


La première étape consisterait en la formation poussée des équipes d’ASV canines, mais également des vétérinaires canins, à propos des NACs. Ainsi, l’équipe au complet aurait les connaissances nécessaires à la bonne hospitalisation et suivi des patients NACs. Il serait en effet intéressant d’appliquer certains principes primaires simples avec ces hospitalisés. Le premier d’entre eux, particulièrement chronophage, est de prendre le temps d’observer l’animal aussi rigoureusement que méthodiquement. En effet, tout doute ou toute observation de modification de l’attitude du pensionnaire est un indice pour le vétérinaire quant à l’évolution possible du traitement et de l’hospitalisation. Il est alors primordial de pouvoir compter sur un œil avisé et averti afin de surveiller le NAC : vient ici le deuxième principe, qui consiste en une connaissance fine des besoins de l’hospitalisé. Ainsi, tout comme le propriétaire doit connaître son animal, les équipes canines devraient dans l’idéal également connaître les systémiques de chaque espèce. Cette connaissance permettrait de plus d’aménager les box d’hospitalisation de manière optimale. 

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La suite, avec un troisième principe, consiste alors à pouvoir effectuer les soins demandés par le NACiste. Il faut au passage continuer à limiter le stress du patient. Pour cela, il est recommandé de préparer tous les traitements avant de commencer la manipulation. Cette manipulation doit être faite en douceur, couplée à un ton de voix réconfortant et des caresses rassurantes. Cela va alors de paire avec une intrusion progressive et douce du domaine d’intimité de l’animal : on évite de le prendre brusquement quand il est au repos dans sa cage d’hospitalisation, et on écourte les manipulations chez un animal excessivement stressé. Tout cela doit être fait sous connaissance des signes et des réactions de peur de l’animal. Penser à se laver les mains entre un NAC prédateur et un NAC proie est également une idée intéressante. Dans un contexte itinérant, il faudrait former l’entièreté des équipes canines des cliniques visitées, une formation même superficielle prenant du temps. Il pourrait donc être intéressant de former progressivement aux NACs une ASV canine par clinique afin de superviser l’ensemble du reste de l’équipe.

La seconde étape, et non des moindres, serait d’adapter les cliniques canines. Séparer le chenil des NACs proies de celui des prédateurs est, pour se répéter, un des points clés de cette optimisation. Il est à espérer que d'ici quelques années, la plupart des cliniques décident de se parer d’un pôle NAC. 

 

 

 

 

Une dernière optimisation possible, ainsi qu’une belle ouverture me concernant directement, s’adresse aux nouvelles générations ainsi qu’à leurs formateurs. En effet, pourquoi ne pas commencer la sensibilisation aux problématiques majeures -si ce n’est toutes- abordées ici dès l’école vétérinaire ou l’école d’ASV ? À minima, j’invite humblement toute personne lisant cet article de première année post-bac commune aux Écoles Nationales Vétérinaires Françaises à réfléchir aux propos présentés.

 

Le mot de l'auteur

Matthieu Yacoub, ENVT Promotion 2027

(matthieu.yacoub_21@envt.fr) 

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"Ce stage m’a construit, aussi bien sur le plan de la technique que sur celui de la réflexion. Les moments que j’y ai vécus sont des expériences extraordinaires m’ayant permis de grandir.

J’y ai rencontré des propriétaires géniaux, faisant de leur mieux pour offrir à leur animal la meilleure vie possible. Parmi eux, certains se sont déjà engagés dans cette voie d'optimisation, et ce de manière efficace. Mes pensées divaguent ici tout de suite vers Yoko, perruche callopsitte extraordinaire, et son humaine, qui mènent toutes les deux à merveille un training médical admirable. Ce sont les rencontres de ce genre qui me permettent de grandir en tant qu’humain au contact de la faune de compagnie. 

De même, j’ai rencontré une vétérinaire, le Dr Mélanie COQUELLE, et son assistant, Breth, qui font de leur mieux chaque jour pour rendre l’accueil de leurs patients à poils, plumes et écailles le plus agréable que possible pour ces petites bêtes. Leur approche de leur métier et de l’animal m’a ainsi permis de grandir en tant qu’étudiant vétérinaire.

Enfin, comment terminer ce rapport sans espérer que vous qui me lisez avez apprécié cette lecture."