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Gestion de la douleur chez le lapin

Par Le 15/09/2015

Dans NACtualités scientifiques

Lapin

La gestion de la douleur dans une clinique vétérinaire est essentielle, à plus forte raison lorsque ses conséquences peuvent être lourdes chez les NACs. Bien évidemment, elle est incontournable d’un point de vue éthique. Qui souhaiterait voir son patient (son animal) souffrir lorsqu’il existe des molécules pour le soulager ? Mais elle l’est également d’un point de vue médical. La douleur agit au niveau de la perfusion des organes et de la respiration. Sa prise en charge diminue donc le risque anesthésique. Chez les NACs, elle peut également révéler des pathologies jusque-là asymptomatiques, notamment des maladies respiratoires ou un syndrome vestibulaire chez le lapin.

L’anticipation permet également d’éviter la mise en place d’une douleur chronique, voire d’une douleur « neuropathique ». En effet, un stimulus douloureux non pris en charge sur le long terme provoque une augmentation de sensibilité de l’animal. La perception de la douleur s’en trouve alors déformée, parfois même jusqu’à trouver une simple caresse douloureuse !

 

Quelles sont les spécificités de la douleur du lapin ?

 

La douleur du lapin est difficile à évaluer et il n’existe pas d’échelle de score de douleur. Etant une proie dans la nature, il a tendance à cacher ses faiblesses. Cependant, son attitude générale peut renseigner le clinicien : un lapin normal est curieux, explorateur, vif et alerte. A l'inverse, un lapin stressé sera figé, et un lapin douloureux réduira de manière prononcée son activité

 

Une conséquence de la douleur particulière aux herbivores de compagnie est le risque d’arrêt de transit. Lorsque l’animal est douloureux, il se déplace moins, mange moins, se déshydrate. Il encourt également le risque de développer une entérotoxémie ou une surcharge graisseuse du foie. Ces situations aboutissent toutes à un ralentissement de transit qui peut mener au décès de l’animal.

Limiter la souffrance au sens large

La souffrance et le stress sont pris en charge dès l’arrivée de votre animal dans la clinique. Cela passe par une contention douce et adaptée à son espèce, une hospitalisation au calme, avec un abri à disposition. Dans l’idéal, une salle spécifique « proies » est mise à disposition, afin que les petits herbivores et omnivores de compagnie ne perçoivent pas l’odeur de potentiels prédateurs (chiens, chats). Certains apprécieront la compagnie d’un congénère, cela étant particulièrement vrai pour les cobayes en raison de leur nature très sociable. 

 

Une technique chirurgicale délicate limite également la douleur.

Lapin hospi

 

L'utilisation des anti-douleurs

 

Votre vétérinaire a accès à 5 types d’analgésiques qui couvrent des douleurs d’intensité et de durée différentes, qui ont chacun leur intérêt. Tout l'art du clinicien est de jongler avec ces différentes molécules pour limiter les doses et donc les effets négatifs d'une molécule. Cela permet d'obtenir un effet anti-douleur parfaitement adapté à chaque situation et chaque animal. C'est ce qu'on appelle l'analgésie multimodale.

Jongleur

Parmis ceux-ci, les morphiniques (opioïdes) sont les plus puissants anti-douleurs. Ils sont utilisés pour des douleurs modérées à forte selon la molécule, d’une chirurgie de stérilisation à une chirurgie orthopédique très douloureuse. Ils peuvent être administrés par voie orale, par injection intramusculaire, intraveineuse,sous-cutanée. mais également pour une anesthésie locale. La durée d’action va d’une 20aine de minutes à 6h selon la molécule utilisée. Ils peuvent avoir un effet sédatif et leur utilisation doit être surveillée chez un animal ayant une pathologie respiratoire.

 

Les anti-inflammatoires sont quant à eux efficaces contre des douleurs faibles à modérées, qui peuvent être donnés à la maison. Ils sont très utiles pour diminuer une douleur liée à un gonflement, ainsi que dans la gestion des douleurs chroniques. Ils permettent également d’augmenter l’action des morphiniques sans augmenter la dose. La posologie du meloxicam chez le lapin est beaucoup plus élevée que chez le chien ou le chat, ainsi ne soyez pas surpris que votre vétérinaire prescrive la dose d’un chien de 10 kg à votre lapin de 2 kg !

 

Les anesthésiques locaux sont toutes les molécules qui peuvent être administrées directement sur le site douloureux : intra-articulaire, cutané, infiltration, épidurale, bloc nerveux… L’utilisation de lidocaïne et/ou bupivacaïne permet par exemple d’anesthésier un groupe de nerf pour une extraction dentaire. Leur utilisation permet de diminuer les doses anesthésiques. C’est logique : il est plus facile de « dormir » lorsque la douleur est absente !

 

Les alpha2 agonistes sont la 4ème  famille d’analgésiques. Ceux-là ne peuvent être utilisés à la maison comme antidouleur car ils sont également très sédatifs, et ont d’importants effets cardio-vasculaires. Leur avantage réside par contre dans l’existence d’un antidote. C’est en pratique un anesthésique qui a un intérêt anti-douleur.

 

Les autres molécules disponibles n’appartenant à aucune de ces familles sont par exemple la kétamine, utilisée comme anesthésique et qui a un intérêt dans la prévention des douleurs chroniques, et le tramadol, qui a une action mixte dans la gestion d’une douleur modérée à forte…. Malheureusement, cette dernière molécule utilisable à la maison a montré des effets extrêmement variables d’un lapin à un autre.

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Source

BARTER LS : Rabbit analgesia, Vet Clin North Am Exot Anim Pract, 2011, 14(1)

WENGER S : Anesthesia and analgesia in Rabbits and Rodents, Journal of Exotic Pet Medicine, 2012, 21(1)

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